Débuts de la Protection et de l’Exploration

Premier statut de protection des monts Nimba

Les 60 % des terres les plus au nord des monts Nimba ont acquis le statut de Réserve naturelle intégrale (RNI) en juillet 1944. Elles couvrent un territoire qui correspond aujourd’hui aux parties guinéenne et ivoirienne des monts Nimba. La gestion de la réserve a débuté en 1946 avec le transfert des villages et des fermes se trouvant sur son territoire vers l’extérieur de ses frontières, et l’accès à la réserve a été interdit. Au milieu des années 1950, la RNI a été étendue vers le sud-ouest, près des villages de Nyon et de Thuo. À l’aide de la technologie moderne du SIG (Système d’information géographique), il a été établi que la RNI dans son ensemble couvrait un peu plus de 200 km2. Au cours des années 1940 et 1950, des recherches approfondies menées dans les monts Nimba, ont abouti à de nombreuses publications.

Indépendance de la Guinée et exploitation minière au Libéria

Après l’indépendance de la Guinée en 1958, la plupart des chercheurs étrangers ont quitté le pays, pour poursuivre leurs études en Côte d’Ivoire ou au Libéria, où des centres de recherche ont été créés dans les années 1960 et 1970. Au milieu des années 1950, à la suite de la découverte d’une hématite de haute qualité dans la partie libérienne des monts Nimba, tout près de la frontière avec la Guinée et la Côte d’Ivoire, une grande mine de fer avec une carrière à ciel ouvert a été construite à partir de 1960. Celle-ci a été exploitée jusqu’au début des années 1990, époque à laquelle elle fut abandonnée à cause de la guerre civile au Libéria.

Première exploration minérale dans la partie guinéenne des monts Nimba

L’exploration minérale a débuté en Guinée à la fin des années 1960, sous la direction du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), puis sous celle de différents investisseurs travaillant en collaboration avec l’entreprise Mifergui-Nimba au cours des années 1970 et 1980. Bien que plusieurs études et évaluations d’impact environnemental aient été menées, aucune mine ne fut ouverte. La première phase de guerre civile libérienne (1990-1996) rendit impossible l’exportation de minerai par la voie ferrée voisine, qui partait d’un point à 2 kilomètres au sud de la frontière avec la Guinée et allait jusqu’au port en eau profonde de Buchanan, sur la côte libérienne.

Création de la Réserve de biosphère et d’un Site du patrimoine mondial naturel

En 1980, la partie guinéenne des monts Nimba a été classée sous le titre de Réserve de biosphère des Monts Nimba (RBMN), sous l’égide du Programme de l’Unesco sur l’Homme et la Biosphère (MAB). Cette Réserve de biosphère était composée d’une aire centrale de conservation d’environ 100 km2 et qui couvrait à peu près les deux tiers de la partie guinéenne de la RNI, et d’une « zone tampon » d’environ 50 km2, au nord, dans laquelle se trouvaient les principaux gisements de minerai de fer où l’exploitation minière devait avoir lieu.

Suite à sa nomination en 1981, la portion guinéenne des monts Nimba a été inscrite sur la Liste du patrimoine mondial parce qu’elle est une représentation exceptionnelle de processus écologiques et biologiques en cours dans l’évolution des écosystèmes et espèces (critère ix de ‘valeur universelle exceptionnelle’ ou VUE), et du nombre et de la diversité des espèces et des écosystèmes présents sur son territoire, notamment des espèces et des habitats rares et endémiques (critère x de VUE). La partie ivoirienne des monts Nimba a été ajoutée au Site du patrimoine mondial en 1982. Ensuite, une déclaration rétrospective de valeur universelle exceptionnelle a été officiellement adoptée pour le Site du patrimoine mondial du mont Nimba, en spécifiant en quoi le site remplissait les critères ix et x de VUE.

Controverse sur les frontières du Site du patrimoine mondial

Les frontières du Site du patrimoine mondial du mont Nimba proposées par la Guinée en 1981 comprenaient l’ensemble de la RNI, conformément aux modifications apportées au milieu des années 1950.

Le gouvernement guinéen a, par la suite, déclaré que la proposition contenait une erreur : les frontières recherchées étaient en réalité celles de l’aire centrale de la Réserve de biosphère datant de 1980. Cette question était importante et controverse car cette proposition de frontières aurait permis l’exploitation du minerai de fer situé dans la partie nord de la chaine. L’exploration minière a été poursuivie de façon active par les prédécesseurs de la SMFG tout au long des années 1980. Une proposition révisée de frontières, soumise en 1991, sans la partie nord du Site, a été rejetée par le Comité du patrimoine mondial.

En 1992, le Site du patrimoine mondial du mont Nimba a été inscrit sur la Liste du patrimoine mondial en péril, en raison de l’arrivée de réfugiés libériens et de la proposition d’exploitation du minerai de fer.

Depuis 1992, les monts Nimba n’ont pas quitté cette liste, les raisons évoquées à ce maintien variant selon les époques et évoquant des pressions des activités de subsistance de la population locale, la présence intermittente de réfugiés et les impacts potentiels de l’exploitation minière.

Accord sur les nouvelles frontières

Accord sur les nouvelles frontières

En mai 1993, une mission menée sur le terrain par le Centre du patrimoine mondial avec la participation de l’UICN et de ses conseillers, du Programme MAB (Programme de l’UNESCO sur l’Homme et la Biosphère), du PNUD, du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), d’ONG nationales et internationales, et de représentants du gouvernement guinéen, a abouti à la recommandation visant à modifier les frontières de la partie guinéenne du Site du patrimoine mondial du mont Nimba.

Cette recommandation a été acceptée par le Comité du patrimoine mondial en décembre 1993. Cette modification des frontières n’excluait pas l’ensemble de la zone proposée par le gouvernement guinéen en 1991, mais excluait en revanche une enclave minière en forme de trou de serrure qui entourait la majeure partie des gisements connus de minerai de fer et dans laquelle les activités minières seraient autorisées. Le reste de la partie guinéenne de la RNI des monts Nimba, et l’ensemble de la partie ivoirienne de cette RNI, bénéficieraient d’une protection permanente.

La mission de mai 1993 recommandait également que la Réserve de biosphère des monts Nimba soit élargie pour inclure trois aires centrales : la partie guinéenne des monts Nimba (moins l’enclave minière), les Collines de Bossou (connues pour une population de chimpanzés semi-habitués et considérés comme sacrés) et la Forêt de Déré, à l’est des monts Nimba et limitrophe de deux forêts classées en Côte d’Ivoire. Cette recommandation a été acceptée par le Programme MAB.

Lire plus d’informations sur les sites et les critères du patrimoine mondial, et des documents spécifiques sur le Site du patrimoine mondial du mont Nimba

Harmonisation des statuts de protection nationaux et internationaux

En 2010, le gouvernement guinéen a promulgué un décret qui (i) aligne les frontières de la RNI des monts Nimba sur celles du Site du patrimoine mondial du mont Nimba, (ii) classe les Collines de Bossou et la Forêt de Déré comme des réserves naturelles intégrales, et (iii) classe la zone tampon de la RBMN et le Périmètre minier (c’est-à-dire la zone située dans le trou de serrure réservé à l’exploitation minière en 1993 mais se trouvant en dehors de la concession minière de la SMFG) en réserves naturelles gérées.

Les activités dans ces réserves naturelles gérées doivent être rigoureusement contrôlées pour être compatibles avec les objectifs en matière de conservation des réserves naturelles intégrales contigües. Le décret autorise explicitement les infrastructures minières et les activités qui y sont liées, que ce soit dans le Périmètre minier ou la zone tampon, à faciliter la réalisation d’un projet d’extraction de minerai de fer dans la concession minière. Enfin, une vaste aire de transition a été établie autour de la zone tampon. Les bonnes pratiques développées dans la zone tampon devront y être reproduites.

En plus des statuts de protection des zones de la Réserve de biosphère en Guinée et la RNI ivoirienne, la partie libérienne de la chaîne des monts Nimba est officiellement protégée depuis 2003 en tant que Réserve naturelle du Nimba oriental (East Nimba Nature Reserve).